Pour cette nouvelle année, parce que je ne sais pas trop par quel bout la prendre...un détour par le Japon. Parce que nous sentons bien que nous allons avoir besoin de lumière et au Japon, la lumière, celle qui nous accompagne, c’est la lumière de la lune. Car la lune voyage, change de forme et d’éclat, tout comme nous. La lumière de la lune, c’est notre véritable nature, nature de lumière, nature de Bouddha, même lorsqu’elle est cachée.
Et cette année nous voyons beaucoup d’obstacles déjà, mais nous pouvons aussi apercevoir, toujours, la lumière. Voici ce qu’écrivait au 10 ème siècle Murakami Shikibu, poétesse et romancière :
« A partir de l’obscur
en un chemin plus obscur encore
il me faut m’engager
Puisses-tu au loin m’éclairer
lune de la crête des montagnes. »
Et en écho, parce que nous aussi nous sommes sur un chemin obscur, et que malgré tout, nous ne pouvons pas laisser s’éteindre cette petite flamme qui brûle en nous, nous ne pouvons pas laisser disparaître le renouveau possible, c’est une attente, c’est un espoir…Une intuition, un frissonnement, un changement attendu, au-delà des circonstances, une ouverture, une nouvelle année
Une attente et un espoir…
C'est une attente ; une attente et un espoir. Au plus profond des jours sombres, dans la noirceur des branches dénudées, dans la brume qui voile les montagnes, dans le blanc craquant du gel matinal.
Dans les feuilles mortes qui retournent à la terre, dans l'odeur familière de fumée au crépuscule, dans la petite pluie qui glace, et dans le soleil, soudain, qui s'allonge à la fenêtre, c'est un espoir.
C'est une attente et un espoir. Et nos gestes les plus routiniers, les plus machinaux, s'éclairent ; les mains frôlent la vaisselle, caressent l'évier, posent avec douceur la tasse déjà pleine, s'attardent sur ces choses qui nous entourent.
Parce que la vie est un peu plus grande que la vie ; le jour un peu plus lumineux que le jour. C'est une attente, mais sans inquiétude, une légèreté d'attente, une attente épurée où il ne reste plus que la joie tranquille, sans impatience.
Parce que c'est là, en fait, déjà là qui nous accompagne depuis toujours, mais, vous savez comment c'est, au fil des jours, au fil du temps, on oublie.
Ce qui nous emplissait, ce qui faisait frémir notre coeur chaque fois que notre regard s'évadait des difficultés quotidiennes, petit à petit a reculé, envahi par l'urgence de choses pas du tout urgentes, recouvert par la trame incessante des demandes et des distractions.
C'est un espoir qui chante maintenant dans les mots les plus ordinaires : « Fais attention, couvre-toi, je peux t'aider ? » ; un espoir qui rit en nous, allégeant le poids de l'inutilisé ; un espoir qui ouvre les fenêtres du coeur et efface les peurs, les peurs d'hier et celles de demain.
Un espoir de renouveau, mais aussi de retour vers ce qui toujours nous appelle, voix claire dans le fouillis du temps, douceur dans les épines de nos peurs.
C'est une attente, c'est pour bientôt.
Et, bien sûr, ce sera différent, cette fois-ci. On ne le laissera pas partir, ce chant de l'aube, de l'oiseau, de l'alleluia ; on ne se réhabituera pas, on ne se laissera plus glisser, presque indifférent, dans l'oubli de la joie.
On restera dans cette joie ; nomades, on la parcourra en tous sens; on s'en couvrira comme d'un manteau, on la distribuera comme un cadeau trop beau pour ne pas être partagé avec tous ceux qui nous entourent. Parce que la vie est un peu plus grande que la vie; le jour un peu plus lumineux que le jour.
Parce qu'il y a cet amour au coeur du plus sombre, au coeur des nuits les plus obscures; parce qu'il nous porte, ou bien c'est nous qui le portons, on ne sait pas très bien, c'est sans importance. Pas fragile, non, indestructible, mais aussi douleur, parfois, quand on perd le chemin.
C'est une attente et un espoir; un espoir déjà réalisé, une reconnaissance totale; c'est un don du pain et de la vie, de la parole et du silence, de l'émerveillement et du rire.
C'est un oui absolu.
Dans le froid de l'hiver, dans le dépouillement de la nature, dans le repos de la terre, c'est une promesse.
C'est pour bientôt.
Joshin Ni

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