Joshin Sensei m'a invitée à prendre la parole aujourd'hui et je suis contente de partager avec vous une pratique qui m'accompagne pendant cette période de confinement que nous vivons et qui m'apporte beaucoup de joie: le lavage des mains. Ce petit geste du quotidien est devenu, dans les dernières semaines, une des mesures de prévention les plus efficaces et simples pour nous protéger et protéger les autres.
Comme vous le savez tous, il est conseillé de passer au moins 30 secondes à bien se laver les mains lorsque nous rentrons à la maison, ainsi qu'avant de manipuler des aliments, de manger, après être allé aux toilettes, au moment de s’occuper de quelqu’un d’autre, notamment des personnes fragiles (enfants, personnes âgées), ou après avoir pratiqué des activités salissantes ou manipulé des animaux.
Je me suis dit que prendre le temps pour bien me laver les mains ça pourrait être une magnifique opportunité pour avoir, tout au long de la journée, des petits moments pour m'arrêter, revenir, être vraiment présente. Et c'est là que j'ai découvert comment ce petit geste peut être si profond et plaisant au même temps.
Normalement ça se passe comme ça: je me place devant le lavabo ou l'évier, je ferme les yeux quelques secondes, le temps d'entrer en contact avec ma respiration, avec mon corps. Puis je joins mes mains comme cela (gassho), en signe de respect, d'unité. J'ouvre le robinet. Je sens l'eau qui coule entre mes mains. Quelques secondes ça suffit, le temps de les mouiller; puis je referme le robinet. Je prends le savon, je savonne les paumes, les frottant une contre l'autre, puis la partie extérieure, les jointures, chaque doigt, les ongles, les poignets... J'en profite pour me faire un petit massage! Je sens la mousse, le parfum du savon, le contact d'une main avec l'autre. Puis j'ouvre le robinet, en les rinçant à l'eau courante, et je les essuie bien.
Cela me prendre peut être une minute ou deux. Maintenant que nous avons le temps, nous pouvons profiter de ces moments si précieux.
Peu à peu, ce petit geste s'est élargi et un sentiment de profonde gratitude est apparu.
Gratitude d'abord envers ces mains qui m'accompagnent depuis tant des années, qui m'ont permis d'entrer en contact avec le monde, de le connaître, de m'exprimer, de travailler, d'offrir une caresse ou prendre une autre main quand j'ai eu besoin d'aide. Elles sont toujours là, en première ligne, à disposition, de façon si humble que l'on ne remarque même pas leur présence. Je me suis demandée comment aurait été ma vie si je ne les avais pas eues, sûrement différente.
Cette réflexion m'a amenée à me tourner vers ma famille, mes parents, qui m'ont permis d'avoir ces mains, d'avoir cette vie, qui ont pris soin de moi, en veillant pour que tout se passe bien et que je puisse arriver jusqu'à ici. Gratitude pour toutes ces personnes qui m'ont précedée, mes ancêtres, que je ne connais pas, et qui pourtant font partie de moi, qui sont eux aussi dans mes mains.
Gratitude pour cette eau qui est disponible comme ça, juste en ouvrant le robinet. À travers elle, je me sens reliée à la terre, au ciel, aux montagnes et rivières. Je pense à toutes ces personnes, dans d'autres pays, avec d'autres conditions de vie, qui n'ont pas d'eau courante, ni même d'eau potable. Elles sont là aussi au moment de me laver les mains. Pour elles, par respect, je m'engage à en faire bon usage, à n'utiliser que ce dont j'ai vraiment besoin.
Ces réflexions et d'autres, venues au cours de ces semaines, ont donné une autre dimension au fait de se laver les mains. Maintenant je le vis comme un acte de purfication, aussi bien corporelle que spirituelle. Un moment qui m'apporte beaucoup de joie et de paix. Un moment de reconnaissance et d'offrande envers tous les êtres.
Pour finir, j'aimerais partager avec vous le petit poème, le gatha que je récite lorsque je me lave les mains:
"Maintenant je me lave les mains
pour le bien de tous les êtres.
Puissé- je les servir
en ne leur offrant que pureté".
Merci.
Toen Ni