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Photo du rédacteurJoshin Sensei

Sans faire toute une histoire…

« La tradition bouddhiste propose les méthodes les plus humoristiques et les plus radicales à ceux qui souhaitent faire tout ce qu'il faut pour vivre une vie positive et pleine de compassion. Elle offre un chemin à ceux qui ne sont plus intéressés par l'auto-illusion ou la dissimulation de leurs tendances habituelles. Il invite chacun.e d'entre nous à faire l'expérience de la liberté d'exposer notre confusion cachée à la lumière de notre intelligence. » Elizabeth Mattis Namgyel


Il n'y a aucune limite à ce que nous pouvons savoir à propos de n'importe quelle chose. Parce que le monde change sans arrêt, et notre esprit change avec lui.


Son idée, à partir de là, c’est que pour savoir, nous devons poser des questions, pas des questions à des personnes extérieures, mais nous interroger nous même sur ce que nous « savons » - mais il faut le faire de façon habile, c’est-à-dire en laissant la question ouverte- cf interview...pas une question avec pour seule réponse oui/non, mais une question : «  Qu’est-ce que c’est... » qui nous permette de réfléchir, et voir un nouvel angle.


Lorsque nous posons une question ouverte, notre esprit n'est pas déjà fermé autour d'une conclusion, il cherche la nature de l'objet de son questionnement et à ce moment-là, nous sommes prêts à voir des structures ou à rapprocher des choses qui semblaient différentes. Il n'y a aucune limite à ce que nous pouvons savoir à propos de n'importe quelle chose parce que le monde change sans arrêt, et notre esprit change avec lui.


Une question ouverte nous permet d'accepter l'immensité de la réponse à notre questionnement sans faire toute une histoire. Peut-être que cette expression « faire toute une histoire » va nous aider à comprendre quelque chose.


Quand mon fils était tout jeune, je l'emmenais faire une promenade à l'extérieur où il pourrait s'amuser à grimper et à jouer avec d'autres enfants. Au coin de ce terrain de jeux, il y avait un personnage que nous appelions l'homme- ballon qui avait le travail lucratif de vendre des ballons aux enfants, ballons avec toutes sortes de formes : chapeaux, épées ou animaux, et mon fils choisissait toujours un ballon en forme d'épée et il s'amusait à des duels imaginaires avec les rochers ou les buissons épineux. Ce qui fait que, très vite, le ballon éclatait !

À chaque occasion, au moment du pop, quand inévitablement le ballon éclatait, je remarquais un phénomène curieux: une pause, une pause pleine de possibles. Alors je regardais mon fils, en attendant de voir quelle direction il allait prendre.


Est-ce qu'il allait reconnaître l'ironie de traverser la même chose encore et encore?

Ou bien

Est-ce que le pop ! allait le faire éclater de rire - ça c'était vraiment un plaisir quand ça se produisait...

Ou bien

Est-ce qu'il allait « faire toute une histoire », autrement dit se fâcher?


En fait, ce qui revenait le plus, c'était faire une histoire, et ça arrivait tout doucement.

Il y avait d'abord le pop suivi par un moment de silence, puis une série d’expressions changeantes sur son visage qui indiquaient qu'il n'avait pas encore tout à fait décidé ce qu'il pensait de tout ça. Mais rapidement, les cris de déception arrivaient avec des pleurs et cette histoire allait commencer à se solidifier. Je regardais la disparition de toutes les autres réponses possibles avec, je dois dire, une certaine déception.

(je trouve qu’on se reconnaît bien dans cette description, ce qui m’a frappée aussi, c’est que avec le temps, malheureusement nous arrivons beaucoup plus vite à déception, colère et la fermeture. C’est cela « se solidifier »...ne plus avoir la souplesse de notre esprit ! on est enfermé dans ce que j’appelle « les ornières «  et on « fait un histoire »!)


Je parle d'un enfant ici, mais en fait ça continue lorsqu'on est adulte, et que nous avons nos propres ballons métaphoriques qui éclatent.Alors qu'est-ce qui fait que nous ne pouvons pas rire ou avoir du plaisir devant les possibilités infinies d'une situation ; ou bien qu'est-ce qui fait que nous ne pouvons pas répondre à des circonstances exigeantes sans paniquer ou refermer notre cœur ?

Est-ce que nous ne pourrions pas avoir le savoir-faire pour supporter cette énergie qui naît d'une situation sans rétrécir le champ de nos réactions (le solidifier) ; est-ce que nous aurions alors davantage accès à la clarté de nos esprits et à notre possibilité de répondre avec créativité ?


Parfois dans notre perception d'un objet apparaît quelque chose de nouveau et cela nous fait questionner sa nature. C'est comme si l'objet de notre attention nous envoyait un indice pour nous dire qu’il n'est peut-être pas exactement ce que nous en pensons.

C'est comme voir un nouveau côté d'un ami que nous connaissons depuis longtemps, un côté qui peut nous toucher ou nous inspirer, qui nous fait voir notre ami avec un regard neuf.

De telles compréhensions nouvelles sont vraiment intéressantes, surtout si nous avons souvent l'envie d'aller au-delà de la façon habituelle dont nous voyons les choses.


« Au-delà » on reconnaît là le terme de la Prajnaparamita : le Soutra de base du Mahayana qui traite de la Perfection de la Sagesse et de la Vacuité : « Perfection » ici n'a rien à voir avec nos préférences comme dans parfait ou imparfait. « Perfection » fait référence à la capacité qu’a l’esprit de rendre compte de tous les aspects de la vie, sans fermeture, sans espoir ni peur, et sans croyance ni doute. Et « Vacuité » serait le contraire de « solidifier », un infini de possibles toujours en flux... !


La capacité de développer une idée nouvelle et cette expérience d'aller au-delà ( de notre vue limitée, qui nous empêche de voir complètement, de voir tous les possibles) est la base de la signification de la Prajnaparamitta.



Ne pas « faire une histoire » a quelque chose à voir avec l'esprit prêt pour la compréhension profonde, la Sagesse, Prajna...c'est-à-dire notre possibilité à reconnaître une dimension ouverte de la vie, et à l’apprécier.

Le terme « Vacuité » a quelque chose à voir avec le fait que la vie que nous rencontrons est trop vivante pour la majorité de nos idées. Parce que l'objet de notre prise de conscience est toujours libre, libre de ce quelque chose que nous lui attribuons.

Dans nos moments de stupéfaction émerveillée, l'esprit ordinaire s'arrête…


Alors, au lieu de « faire une histoire « devant cette vie » trop vivante », nous pouvons nous mettre à rire devant les aventures infinies de notre vie ; quand nous avons compris avec sagesse eavec Prajna, que chaque ballon que nous transportons va faire « pop » à un moment ou à un autre… !


Elizabeth Mattis Namgyel Disciple de Dzigar Kongtrul Rinpoche





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