Qui est l'ennemi ?
- Joshin Sensei

- 23 août
- 4 min de lecture
« Lorsque nous disons : « Puissé-je être heureux », nous parlons pour tout le monde. Le monde entier est un. La vie est une. Nous relevons tous de la même nature de Bouddha.
La bienveillance est une énergie très puissante. Elle rayonne sur tous les êtres, sans distinction. Elle rayonne sur nos proches, sur ceux qui nous sont indifférents et sur nos ennemis. Il n’y a pas de frontières à la bonté et à la bienveillance. Le Dhamma est fondé sur l’amour bienveillant. Le Bouddha a regardé le monde entier avec compassion. Ainsi, notre prière pour obtenir un bonheur personnel se transforme naturellement en une prière pour tous : « Que le monde entier soit heureux et libre de toute souffrance. »
Maha Ghosananda était un moine bouddhiste cambodgien très vénéré dans la tradition Theravada. Il se trouvait en Inde lorsque les Khmers Rouges ont pris le pouvoir au Cambodge.
En 1978, Maha Ghosananda s'est rendu dans les camps de réfugiés près de la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge pour commencer à s'occuper des premiers réfugiés qui traversaient la frontière. Il a distribué des photocopies de textes bouddhistes aux réfugiés, afin de protéger et d'inspirer ce peuple meurtri. Malgré les menaces, lorsque le grand temple en bambou fut achevé, près de 20 000 réfugiés se rassemblèrent pour réciter à nouveau les chants perdus, abandonnés lorsque les villages avaient été incendiés et les temples détruits. Maha Ghosananda chanta les chants traditionnels tandis que des milliers de personnes pleuraient.
Maha Ghosananda s'adressa avec la plus grande simplicité à ceux qui avaient souffert, récitant à plusieurs reprises dans la langue ancienne du Bouddha et en cambodgien ce verset du Dhammapada :
La haine ne cesse jamais par la haine
mais seul l'amour peut la guérir.
C'est la loi ancienne et éternelle.
Lorsque le régime de Pol Pot s'est effondré en 1979, Maha Ghosananda était l'un des 3 000 moines bouddhistes cambodgiens encore en vie, sur les 60 000 que comptait le pays au début du règne de la terreur en 1976.
Toute sa famille, ainsi que d'innombrables amis et disciples, ont été massacrés par les Khmers rouges.
Jack Kornfield
« L'inaction est la source de toute action. Nous ne pouvons pas faire grand-chose pour la paix dans le monde si nous ne sommes pas en paix avec nous-mêmes. Ainsi, lorsque nous commençons à faire la paix, nous commençons par le silence, la méditation et la prière.
Faire la paix exige de la compassion.
Cela exige la capacité d'écouter. Pour écouter, nous devons renoncer à nous-mêmes, même à nos propres mots. Nous écoutons jusqu'à ce que nous puissions entendre notre nature pacifique
En apprenant à nous écouter nous-mêmes, nous apprenons à écouter les autres également et de nouvelles idées émergent. Il y a une ouverture, une harmonie. En apprenant à nous faire confiance les uns les autres, nous découvrons de nouvelles possibilités pour résoudre les conflits. Lorsque nous écoutons attentivement, nous entendons la paix grandir.
La paix exige la pleine conscience. Il n'y a pas de paix avec la jalousie, l'arrogance ou les critiques inutiles. Nous devons décider que faire la paix est plus important que faire la guerre.
La paix exige l'altruisme. C'est l'altruisme qui lui fait prendre racine. Nous ne pouvons pas faire grand-chose pour la paix tant que nous pensons être les seuls à connaître le chemin.
La paix exige de la sagesse. La paix est un chemin que l'on choisit consciemment. Ce n'est pas une errance sans but, mais un voyage étape par étape
Enfin, la paix est la Voie du milieu, celle de l'équanimité, de la non-dualité et du non-attachement. La paix signifie l'équilibre parfait entre la sagesse et la compassion, et la rencontre parfaite entre les besoins humanitaires et les réalités politiques. La bienveillance est la seule voie vers la paix. »
Qui est l'ennemi ?
Dans le livre Step by Step( Pas après pas) il raconte cette histoire :
« En 1981, les Nations Unies ont organisé une conférence pour discuter de l'avenir du Cambodge. À cette époque, nous avons organisé une cérémonie bouddhiste pour la paix. À la fin de la cérémonie, un dirigeant khmer rouge s'est approché de moi, très prudemment, et m'a demandé si je voulais venir en Thaïlande pour construire un temple à la frontière. J'ai accepté.
« Oh ! » ont pensé beaucoup de gens, « il parle à l'ennemi. Il aide l'ennemi ! Comment peut-il faire cela ? » Je leur ai rappelé que l'amour embrasse tous les êtres, qu'ils soient nobles ou vils, bons ou mauvais.
Gandhi disait qu'il était toujours prêt à faire des compromis. Il disait : « Derrière ma non-coopération se cache toujours le désir le plus vif de coopérer, sous le moindre prétexte, même avec les pires adversaires. Pour moi, un mortel très imparfait a toujours besoin de la grâce de Dieu, toujours besoin du Dharma. Personne n'est irrécupérable. »
« Je ne remets pas en question, poursuit Maha Ghosananda, le fait qu'aimer ses oppresseurs - des Cambodgiens aimant les Khmers rouges - soit peut-être l'attitude la plus difficile à adopter. Mais c'est une loi de l'univers que la riposte, la haine et la vengeance ne font que poursuivre le cycle de la violence et ne l'arrêtent jamais. La réconciliation ne signifie pas que nous renonçons à nos droits et à nos conditions, mais plutôt que nous utilisons l'amour dans toutes nos négociations. »
Une dernière chose à son propos : en 1992, au cours de la première année de l'accord de paix parrainé par les Nations unies, Maha Ghosananda a mené le premier Dhammayietra national, une marche pour la paix, un pèlerinage à travers le Cambodge, dans le but de commencer à restaurer l'espoir et l'esprit du peuple cambodgien.
« Nous sommes unis par notre propre nature de Bouddha, et grâce à elle, nous pouvons construire des ponts d'unité, de compréhension et de paix. Chaque pas est méditation, chaque pas est prière, et chaque pas construira un pont. »




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