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Photo du rédacteurJoshin Sensei

Le poids des choses

Dernière mise à jour : 23 sept. 2022

S’alléger ? (suite)

Pourquoi se préoccuper des objets ?

Pourquoi ne pas commencer directement par la colère, qui est un poison on comprendrait, mais pourquoi donner la moitié de ses affaires ?

Dans le Zen, il n'y a pas vraiment de différence entre « matériel » et « spirituel » car cette différence reviendrait à dire que ce qui compte serait la tête, l'esprit, ce serait là le lieu de notre travail spirituel, et le corps n'a rien à dire, seulement à suivre ; il faudrait diminuer ses besoins, pour devenir plus « spirituel » ou bien tous les remplir, pour ne plus l’entendre, et pouvoir se consacrer au spirituel.

Or le Bouddha à clairement parler de la Voie du Milieu c'est à dire ni ascèse, ce qu'il a essayé d'abord avant de revenir au monde, de se baigner, de manger, avant de s’asseoir sous l’Arbre de l’Eveil, ni extrême indulgence ce qui était on peut le supposer, sa vie avant son départ du palais.

« Voie du Milieu » évidemment là, nous avons chacun notre définition de ce qui serait le « milieu » mais pour l'un ceci serait un manque douloureux et pour l'autre un hédonisme exagéré.

Alors nous avons besoin de guide ; et même si cela nous semble très loin de nous nous pouvons déjà regarder ce que le Bouddha à autoriser et recommander à ses moines.

Ces moines devaient avoir l'essentiel, c'est à dire de quoi manger, se vêtir, s’abriter, se soigner et étudier. Je crois que si nous regardons cela , c’est déjà un bon point de départ, même si dans notre vie actuelle nous allons rajouter peut être de quoi nous déplacer et de quoi communiquer.

Séparer le matériel et le spirituel ?

Maître Dôgen lui considère le « corps-esprit » comme un seul mot « shinjin » et il ne fait pas de différenciation entre spirituel et matériel non plus, là où nous penserions qu'il y en a une : par exemple dans le Tenzo Kyo Kun, les instructions pour le responsable de la cuisine, laver le riz à la même importance la même valeur que zazen: pas de différence laver le riz n'est pas un obstacle qui nous empêche d'aller nous asseoir- ni une distraction qui nous changerait de zazen mais une pratique tout comme offrir l'encens, désherber le potager, faire zazen.

Dans un autre texte, parlant de « dana », le don, il dit : « Faire offrande signifie ne pas être avide. S'il est vrai qu'en essence, rien ne nous appartient, cela ne doit pas nous empêcher de faire des offrandes. La chose offerte n'est pas importante, ce qui compte est la sincérité de celui qui donne. ( Notre pratique ets une pratique du coeur)

C'est pourquoi vous devriez désirer partager avec les êtres même une seule phrase, ou un verset de la Loi, parce que cela devient une graine de Bien, dans cette vie ou dans le futur. ( spirituel)

Il en est de même lorsqu'on donne son propre bien (matériel), que ce soit une simple pièce ou un brin d'herbe, parce que la Loi est le trésor, et le trésor est la Loi. Il y a toujours eu des êtres qui ont donné volontiers de leurs biens pour aider autrui – sans idée de récompense.

Permettre un passage, ou construire un pont, sont deux actes d'offrande, comme gagner sa vie ou produire des biens. »


Juste faire!

On voit que tous les exemples qu'il donne signifie avoir assez pour soi et pour les autres, ou bien faire quelque chose qui soit bon pour nous et qui en même temps nous relie aux autres, qui aide les autres.

Peut être que cela peut être notre point de départ pour « s’alléger » : avoir assez pour soi et pour les autres, travailler pour soi et pour les autres.

Mais bien sûr avec assez on revient au problème ce qui est « assez » pour l'un et trop ou bien pas assez pour l'autre !

Donc, cessons de tourner en rond et faisons : mettre tout son placard par terre, bien regarder, ni avec une extrême sévérité ni avec une extrême indulgence, et donner la moitié des choses – OK...disons choisir deux choses !

Par où commencer ? Comment décider de ce qui est essentiel et de ce qui ne l’est pas ? La question de base reste simple : est que « cela » contribue à mon bien être et /ou à celui des autres autour de moi ? Si vous n’êtes pas sûr.e, c’est peut-être quelque chose qui non seulement ne sert à rien, mais fait de l’ombre aux choses importantes qui devraient apparaître dans votre vie. ( nous ne parlons pas de « servir » seulement dans un contexte utilitaire...mais là nous retombons sur la même question : pour l’un la beauté va « servir », pour l’autre ce sera les fleurs, etc...Alors il faut continuer, et voir ce qui apparaît à travers les actes!)

Alors, lâcher prise, donner c’est-à-dire diminuer notre avidité, devient une pratique- sans différence spirituel/matériel, au même titre que faire gassho, faire une offrande ou faire zazen.

Pas de différence entre ciel et terre, phénomènes et absolu, samsara et nirvana!


Parce que ce dont nous parlons , c’est l’avidité au sens de Poison ; ce qui amène parce qiue soi nous avons, nous voulons grader, protéger, empêcher les autres d’avoir, et apparaît dukkha : souffrance, malaise, mal-être etc. Nous voyons avec effroi c e mécanisme à l’oeuvre en Europe : construire des murs pour empêcher les autres d’entrer, ceux qui nous « envahissent », viennent nous « prendre »...Avidité, colère et ignorance de la non-séparation fondamentale : refus de la joie du partage, du don...

On se souvient que les dons du gâteau de riz et du coussin d'herbe ont accompagné le Bouddha sur le Chemin de l'Eveil ; de même le travail du tenzô est une pratique du boudhadharma.


Le jeune homme riche

Nos biens matériels sont « personnels » au sens où nous y mettons tant de nous-même, des petits morceaux de « moi » : notre petit moi, avide, désireux d'avoir, d'être confortable, de se plaire et de plaire, de faire du bruit et d'occuper l'espace.

Accepter en douceur de prendre conscience du poids de toutes ces choses que nous avons et du poids de toutes celles que nous voudrions encore, celles que nous n’avons pas encore, mais qui sont dans notre tête, très lourdes aussi...! Et de notre difficulté à dire “Stop! Assez!”

Toute voie spirituelle, tout chemin commence par le dépouillement : cf le départ du Bouddha. Dans un passage des Evangiles, un jeune homme riche vient voir Jésus, et veut le suivre et Jésus lui répond : « Vends tes biens et suis-moi ». Et, nous dit-on, le jeune homme repart, tête basse, triste. Le premier pas nécessite de s’alléger, pour pouvoir suivre le chemin allègre, là où il nous porte, sans être bloqué par tlout ce que nous transportons...

La Voie du bodhisattva

Lorsque nous arrivons à abandonner un peu de tout ce qui nous encombre, nous nous donnons à nous-mêmes de l'espace, espace de joie et de création, espace de respiration.

Et curieusement notre tête aussi se libère ! Ouvrir les mains pour laisser partir les choses nous aide à laisser partir dans notre tête aussi. Nous nous cramponnons moins à nos vieux chemins, à nos vieilles ornières, à nos vieilles rancœurs et colères.

Espace matériel et espace mental se recoupent et la lumière se fait autant dans notre maison que dans notre tête.

Parce que nous pratiquons à travers ce lâcher-prise le Dharma et les quatre Nobles Vérités: la fin de dukkha, tout l'Enseignement du Bouddha, mettre fin à la souffrance.


A la question, cri du coeur, qui m’a été posée lors d’une retraite sur ce thème : « Mais pourquoi est-ce que je devrais me séparer de tout cela ? », je n’ai pas vraiment de réponse. Cela ne peut se dire avec desmots, mais il faut le faire. Cela doit être vécu de tout notre être, comme zazen, ce n’est pas une « compréhension » mais une expérience.

Et puis...nous savons intuitivement que nous aurons à tout abandonner, à tout laisser, cette maison, ces objets, ces personnes et même notre corps...Avançons maintenant, préparons-nous, apprenons à faire de l’espace.

Car abandonner ne signifie pas « ne pas aimer », mais au contraire faire plus de place pour plus d’amour… c’est la Voie du bodhisattva, plus d’espace, plus de lumière, plus d’amour et de compassion...

Il est dit dans un Nikaya, un soutra indien :

“Je déclare que le monde, l'apparition du monde, la cessation du monde, le chemin qui mène à la cessation du monde sont dans cette carcasse haute d'une toise avec ses perceptions et son esprit.

Jamais la fin du monde ne peut être atteinte en voyageant mais il n'y a pas de fin à la souffrance sans atteindre la fin du monde.”










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