Les êtres humains sont très doués pour s'attacher à l'aspect de la vie humaine qu'on nomme plaisir.
C'est pourquoi nous disons souvent : « Profitez de la vie ». Pourquoi dans ces conditions le bouddhisme dit-il : « Regardez la souffrance » ?
Parce que la souffrance est l'un des aspects de la vie humaine qu'on refuse de voir. Nous essayons de fermer les yeux sur la souffrance, mais nous ne le pouvons pas. C'est parce que nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la souffrance que le Bouddha doit dire: « Regardez cet aspect de la vie humaine que vous ne voyez pas » La souffrance étant une noble vérité, dire que la vie est caractérisée par la souffrance n'est pas un enseignement pessimiste.
Il existe trois types de souffrance. L'un est la souffrance physique, l'autre est la souffrance mentale, le troisième est la souffrance radicale, la souffrance fondamentale.
La souffrance physique est la naissance, la maladie, la vieillesse et la mort. Chacun doit faire face à la souffrance physique. Selon l'enseignement du Bouddha, la maladie est une noble vérité. Cela signifie qu'il faut accepter la maladie qui est au-delà de ce qu'on aime ou de ce qu'on n'aime pas. Par exemple, si vous êtes atteint d'un cancer, comment vous libérer de cette souffrance ? Le bouddhisme nous dit d'accepter la souffrance du cancer. Mais il est difficile de l'accepter, parce qu'on croit qu'accepter la souffrance du cancer, c'est ne pas se libérer du cancer. C'est pourquoi on lutte pour se libérer de la souffrance du cancer au lieu de faire face à la souffrance telle qu'elle est. Peu importe que vous luttiez pour vous libérer de la souffrance d'un cancer dont vous ne vous libérerez pas. La souffrance du cancer est la vraie réalité, qui est inéluctable.
Il est possible d'accepter la souffrance du cancer, d'y voir une occasion magnifique d'atteindre le cœur de la vie humaine. C'est l'acceptation totale de la souffrance. Si vous pouvez accepter totalement la souffrance du cancer, vous pouvez vous en libérer. ( bien sûr on ne parle pas ici d’accepter et de ne pas se soigner, mais de notre attitude mentale )
C'est comme essayer de s'endormir. Si vous essayez de dormir, vous ne pouvez pas dormir. Plus vous voulez dormir, plus vos yeux restent ouverts. Si vous ne pouvez pas dormir, ne faites qu'un avec le fait que vous ne puissiez pas dormir. Autrement dit, ne luttez pas. La souffrance, en tant que noble vérité, nous donne l'occasion merveilleuse de nous éveiller à la vérité de la condition humaine.
La souffrance mentale apparaît quand on est séparé de ceux qu'on aime ou qu'on doit supporter ceux qu'on n'aime pas. Chacun a fait cette expérience. La souffrance apparaît aussi quand on ne peut pas obtenir ce qu'on veut. La souffrance mentale vient du fait qu'on s'attache aux cinq skandhas qui
sont la forme, la sensation, la perception, les impulsions et la conscience. Là encore, il s'agit d'aspects de la vie humaine dont chacun fait l'expérience.
Le troisième type de souffrance est la souffrance radicale ou fondamentale. La souffrance radicale est une souffrance qui est due à l'aspect éphémère des phénomènes. Vous pouvez prendre conscience de cette souffrance par une pratique profonde ou une compréhension profonde du tableau global de la vie humaine en tant qu'elle est reliée à tous les êtres sensibles. Autrement dit, en pratiquant profondément le bouddhisme, vous pouvez comprendre la souffrance radicale et en faire l'expérience.
Quand l'esprit est agité et préoccupé, il est très difficile cette expérience. Ce n'est qu'en pratiquant profondément que vous pourrez faire l'expérience de ce type de souffrance. Cette souffrance est très calme, très tranquille et très silencieuse ; mais elle est présente.
Il est très difficile de se libérer de la souffrance radicale. Si votre pratique est très profonde et votre corps et votre esprit très calmes, vous comprendrez les sensations humaines, les sensations de l'oiseau, les sensations de l'arbre ; vous comprendrez toute chose. Pourtant il y a cette souffrance très calme et silencieuse. C'est une sorte de peur, une peur très profonde, venue du tréfonds du corps et de l'esprit humains. Vous ne pouvez pas l'expliquer, mais elle est toujours présente. Vous devez affronter aussi cette souffrance.
Pourquoi est-ce en comprenant profondément la condition humaine que l'on fait l'expérience de cette souffrance radicale ? Le Bouddha nous enseigne qu'une telle souffrance vient de l'ignorance.
L'ignorance est l'attachement humain qui s'enracine avec ténacité dans le corps et l'esprit. Cela échappe tout-à-fait à notre contrôle. On ne sait ni quand ni comment cela apparaît.
DAININ KATAGIRI ROSHI (1928-1990 ) (Retour au silence Ed. Du Seuil.1993)
Regarder notre souffrance ( mal être, malaise, etc) est quelque chose que nous essayions le plus souvent d’éviter ; pourtant, le Bouddha est comme un médecin, si nous ne regardons pas le symptômes d’une maladie, nous ne pourrons pas la soigner.
Texte écrit par une participante à la retraite sur les Quatre Nobles Vérités. Elle avait choisi pour thême: " Voir Dukkha dans notre vie".
J'ai commencé par simplement noter sur une journée toutes les « dukkha » que j'expérimentai. L'éventail de mes dukkha se sont révélés multiples, des plus infimes aux plus importantes et à chaque fois j'ai essayé de voir quel désir et sensation les sous-tendaient (avidité, aversion...). Effectivement plus que l'évènement lui-même c'est plutôt notre réaction à cet événement qui est source de dukkha.
Après pour détruire cette soif, ce désir, cette sensation c'est déjà plus difficile...pour l'instant c'est faible..
Mon moi résiste. En particulier je me pose la question de savoir pourquoi après tout on n'aurait pas le droit de se faire plaisir à travers le plaisir des sens ? A condition de ne pas « s'attacher » en gardant à l'esprit, (donc de voir), l'impermanence de toutes choses ! Je me pose en fait la question de la possibilité de la jouissance sans attachement !
Mais Joshin Sensei m'a dit de me méfier car on peut voir et ne rien lâcher ! Croire qu'on va lâcher, mais en fait rester esclave de son désir. (Et elle m'en a donné un exemple qui me concerne :plaisir de lire quand je suis seule à un repas...J'ai effectivement conscience que cet attitude n'est pas « juste », mais n'arrive pas à la détruire, j'y suis très attachée).
Mais j'ai du mal à accepter qu'il faille renoncer aux plaisirs sensoriels : lire, voir des films, écouter de la musique etc...
Sensei a pointé le fait que l'on est ambivalent : l'esprit singe veut se nourrir, a besoin de stimulation, cette soif est inextinguible, on a soif que ça se reproduise.
Je crois comprendre que le problème est là. Je crois que je lâche le plaisir après l'avoir éprouvé mais en fait si je suis honnête ou du moins consciente, je ne le « lâche » que parce que je sais au fond de moi qu'il me sera possible de le répéter dans un avenir proche.
Joshin Sensei dit aussi que l'ambivalence est là car nous sommes attirés à la fois par ces plaisirs sensoriels et par ailleurs on est attiré par la paix de zazen, où il y a absence de stimulations sensorielles. On accueille et on laisse passer... C'est ce que les japonais expriment dans les haikus : voir le plaisir et le laisser passer, voir et lâcher prise.
Une autre méthode, celle des moines indiens anciens : regarder le sol lors des déplacements pour couper le contact avec les objets sensoriels. Parfois il vaut mieux couper que croire qu'on va lâcher prise !
Mais cela me semble un pis aller, mais qui reste une solution quand on est encore dans les ornières...
La Vérité de la cessation de dukkha , cela me plait car c'est une promesse de bonheur réel : le nibbana.. mais pour l'instant ce n'est qu'un espoir pas vraiment une réalité...mais je suis contente de savoir que c'est possible, c'est une direction.
Enfin la quatrième vérité, l'octuple sentier avec ses 8 branches, permet de se mettre en route sur la Voie. C'est une vraie feuille de route pour guider notre vie quotidienne. Cela donne la solution au problème de dukkha, on peut s'accrocher aux branches qui semblent les plus accessibles (paroles justes, attention..) sachant qu'elles sont toutes liées et interdépendantes.
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