top of page
Rechercher
  • Photo du rédacteurJoshin Sensei

La présence du corps…

( transcription orale)

Après avoir parlé tout janvier de la légèreté, de l’espace et de la lumière, je voudrais revenir de façon plus directe aux Enseignements. C’est important de pouvoir faire une sorte d’aller et retour entre l’application de l’Enseignement dans notre vie, puis revenir aux textes, puis retrouver notre vie… Ce mois de février, c’est simple puisque le 15, c’est le Parinirvana du Bouddha ; et que le Parinirvâna Soûtra a été traduit en français, et est très accessible ; vous en trouverez les réf. ci-dessous.

I

l y a un Soutra pâli, et diverses versions chinoises, avec des textes assez différents. Moi, ce qui m’intéresse, c’est comment nous, nous allons vivre ce Soutra, et comment il va vivre à travers nous.

Ce Parinirvâna Soûtra – pour l’essentiel, la traduction du pâli- est tout à fait spécial, c'est un soutra différent aussi bien des sûtras du bouddhisme indien dans lesquels le Bouddha expose les Enseignements, on a un petit peu les circonstances autour, mais surtout la Parole du Bouddha. Et puis les du soutras postérieurs du Mahayana avec une représentation du Bouddha tout à fait déifié et des guirlandes de fleurs qui tombent et cetera … vous voyez ! Ce sont des enseignements très intéressants mais le Bouddha est très loin de nous.


Mais là dans le Parinirvâna Soûtra, on est tout à fait dans autre chose : il y a la présence du Bouddha et je dirais plus, il y a la présence du corps du Bouddha ; d'une certaine façon on est avec le Bouddha, on marche avec lui : il marche, il s'arrête, il rencontre des personnes, il leurs parle... Il demanda à Ananda de déplier un tissu pour s'allonger par terre, il va à la rivière... enfin il y a une présence du corps du Bouddha que personnellement je n'ai retrouvé dans aucun autre soutra et une interaction, un dialogue permanent avec Ananda. Et à travers cela, on a vraiment un enseignement mais qui est différent : ce n’est pas ce qui est dit, mais ce qui est fait. En effet, même si le Bouddha reprend tous ses grands enseignements au fur et à mesure des personnes qu'il rencontre, pour moi l'enseignement du Parinirvâna Soûtra le plus profond, ce n'est pas à travers ce qui est dit ( que l’on trouve dans d’autre soutras) mais c'est à travers ce qui n'est pas dit qu'on va pénétrer vraiment dans les Enseignements. C'est pour ça que selon moi, ça vaut la peine de le lire et c'est pour ça que je vais en parler pendant le mois de février !


Je vais vous donner un exemple : au début du texte Ananda se tourne vers le Bouddha et lui dit quelque chose comme : « C'est curieux- on a traduit le mot qu’il utilise par « Seigneur »- donc, « C'est curieux Seigneur, votre corps... » et alors là il fait une description incroyable du corps du Bouddha, il dit, il est tout vieilli avec les muscles flasques, avec la couleur du visage tout pâle, avec le dos courbé... Enfin il y a une description absolument incroyable du Bouddha en tant que vieillard, il dit avant vous étiez jeune, vous étiez comme ci vous étiez comme ça, et maintenant c'est tout le contraire et le Bouddha dit oui Ananda, oui c'est comme ça, c'est le corps, c'est la transformation du corps…


Et puis dans les derniers jours, il y a un autre passage où le Bouddha, lorsqu’ Ananda lui demande encore un enseignement pour les moines, répond : je suis fatigué, je suis vieux et usé... il dit : je suis âgé, j’ai 80 ans, je suis comme un vieux char qui a trop été rafistolé, il n’y a que dans les moments où je suis en méditation profonde que ce corps est à l’aise...

Voilà cette présence du corps et donc une démonstration complète de l'impermanence : non pas à travers des mots, non pas à travers un enseignement, mais l’impermanence dans le corps même du Bouddha pour qu'on puisse la voir, la comprendre vraiment. Si le corps du Bouddha était toujours un corps doré, comme il est au moment de son Illumination et comme il va être au moment de son entrée dans le Parinirvâna, comment comprendre l’impermanence la plus évidente, la plus difficile, celle de notre corps ? Or Ananda lui-même vraiment est un petit peu stupéfait, et pourtant, c'est comme ça qu'on la voit, on la voit à travers notre corps, on la voit à travers le corps des autres personnes dont on est proches et là tout d'un coup, voilà, ça nous saute à la figure, l’impermanence, le corps du Bouddha même, c'est l'impermanence ! C'est complètement différent de le comprendre comme ça que de le comprendre dans tous les textes qu'on a pu lire sur l’impermanence.


C'est cela ce que je trouve fascinant dans ce soutra – il y a un double mouvement : le corps du Bouddha, le corps qu'on nous présente dans ce soutra, c'est vraiment un corps humain, c'est un corps-phénomène pour employer des mots de Mahayana, c'est un corps du Samsara, un corps entre naissance et mort. qui a grandi qui est arrivé à maturité et qui ensuite a vieilli, est cassé – les 5 agrégats qui le composent vont le dé-composer.


Et d'un autre côté, et c'est ce double mouvement, il y a le véritable corps du Bouddha parce que quand ses disciples disent mais qu'est ce qui va nous guider maintenant, comment est-ce qu'on va maintenant accomplir le Chemin, il leur dit : vous avez le Dharma et quand vous voyez le Dharma vous voyez le Bouddha. C'est son corps de Nirvana, c'est le corps de lumière, c'est le corps intemporel qui n'est pas lié à la naissance et à la mort.

Il y a le corps- Samsara et le corps- Nirvana : c’est le Dharma intemporel qui se réalise dans le corps du Bouddha comme il peut se réaliser dans notre corps à tout instant. Samsara et Nirvana à travers le corps du Bouddha- à travers le nôtre- ne sont pas différents, ils sont comment dire, un ; tout dépend de notre regard.Et le Bouddha va nous inciter sans cesse à regarder le corps-Nirvana.


Ananda voit le corps-Samsara ; il lui sera reproché justement son chagrin, puisqu’il voit « mort », et n’est pas Eveillé, il ne peut pas « voir » le corps- Nirvana.


Et alors, je vais finir par là, ce qui s’est passé quand on a fait cette retraite. Elle était très intéressante, vraiment très dense , tout le monde a beaucoup travaillé, on a eu beaucoup d'échanges, on se réunissait sur Skype pour parler le soir. Et j’ai été frappée parce que les 2, 3 premiers soirs il y avait une atmosphère assez lourde, pesante ; et c’est à travers ce que quelqu'un a dit un soir j'ai compris pourquoi : en fait « Le dernier voyage du Bouddha » c’était triste ! Oui, c'est son dernier voyage, ça c'est une expression je pense qu'on peut trouver dans d'autres contextes : « son dernier voyage : il va mourir , on approche de la mort, on est déjà mort... » voilà, le Bouddha va mourir, c’était triste ! Ils étaient tous des petits Anandas ! Tristes parce ce soutra nous montre le Bouddha en en train d’être malade, fatigué, et qui va mourir .J’ai trouvé ça vraiment intéressant parce que voilà nous on est dans le Samsara et on n'arrive pas à voir au-delà du Samsara. Parce que la double signification de ce titre c'est que, oui, c'est le dernier voyage : le Bouddha a marché pendant 50 ans dans toute l'Inde du Nord, il est allé ici et là, partout pour enseigner, recueillir des aumônes, fonder des monastères et là c'est son dernier voyage. Arrivé près de la ville de Kushinagara, il va mourir.

Mais ça, c'est faux ! C’est seulement le côté compréhension-Samsara, parce que dans le Samsara, il y a mort il y a naissance ; naissance- mort -naissance -mort naissance mort... on ne peut pas les séparer donc, penser « mort du Bouddha », ça voudrait dire qu’ après sa mort physique, il y aura une naissance à nouveau .

Or ce n’est pas vrai : c'est le dernier voyage du Bouddha parce que justement il est sorti de cette ronde du Samsara, naissance mort naissance mort ; il était dans le Nirvana pendant sa vie après l’Illumination, à savoir, il avait coupé les liens avec la souffrance et quand son corps physique va disparaître, il n’y aura plus de naissance, c’est le Parinirvâna. On ne peut pas dire que le Bouddha est mort parce que mort dans le cadre des enseignements signifient naissance mort naissance mort naissance ...


C'est seulement parce que nous sommes tellement plongés dans le Samsara que nous n'arrivons pas à concevoir autre chose que mort, nous n'arrivons pas à comprendre ce qu'est Nirvana/ Parinirvâna.

Pour mieux comprendre on va regarder ce qu‘a fait le Bouddha au cours de ses derniers jours la semaine prochaine.


- Le dernier voyage du Bouddha Mohan Wijayaratna traduction intégrale du Mahā-Parinibbāna-Sutta et commentaires


-Soutra de l’Ultime Voyage Jin Siyan éd. You Feng trad. à partir du texte chinois ( que l’on trouve dans ce livre bilingue!)


- et en version courte, avec commentaires des pratiquants

http://larbredeleveil.org/daishin/lespritvaste/2019/10/22/les-carnets-de-la-sangha/











65 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page