Harada Roshi : l’Essence du Zen:
"Imaginons par exemple que vous soyez en train d'escalader une falaise. Cette situation vous met entre la vie et la mort. Vous ne pouvez pas vous échapper ; vous ne pouvez pas vous plaindre. Si vous êtes là, vous n'avez rien d'autre à faire que d'être là. Si vous agissez instinctivement, vous risquez de mourir. Si vous êtes nerveux, vous risquez de mourir. Si vous comptez sur votre intellect, vous risquez également de mourir. Aussi, devez-vous compter sur la montagne, sur votre esprit et sur toutes les circonstances. Vous devez observer avec attention et comprendre.
Votre conscience doit être claire et bien attentive à ce qui se passe. Alors quand vous avez fait de votre mieux pour comprendre, votre corps et votre esprit ne dépendent plus que d'un pas. Telle est l'action. C’est faire un pas sans s'angoisser à propos de ce qui se produira le moment suivant, sans penser au moment de l'arrivée, ni à la profondeur du précipice, ni à celui qui escalade, ni combien de temps vous pourrez tenir, ni que vous pouvez mourir.
Il ne faut penser à rien, ne dépendre de rien. Tout ce que nous avons à faire, c'est nous servir de ce que nous avons déjà : conscience, esprit, montagne et condition météorologique. Alors nous devons agir. Un seul pas, un seul pas tout simple.
Ce seul pas, qu'est-ce que c'est ? Tout ce qu'il y a à faire, c'est de vivre. Faire un pas, faire quelque chose parce que c'est ainsi que se manifeste totalement la nature ultime de l'existence.
Pour laisser se manifester la nature originelle de l'existence, nous devons nous comporter d'une certaine manière. Avoir la foi, c'est agir, et agir, c'est vivre. Mais agir par nous-mêmes en ayant une connaissance étendue de la vie humaine est plutôt difficile, parce que chacun de nous possède son propre territoire, ses idées toutes faites, son égoïsme, son patrimoine héréditaire et ses caractéristiques.
Il n’est pas facile de considérer la vie humaine d'un point de vue universel. Il nous faut sortir de notre petit compartiment personnel. Nous nous y sentons presque toujours à l'aise, mais il nous faut en sortir, ne serait-ce qu'une fois et pour ce faire, nous avons besoin d'être guidés.
M° Dogen dit : « Vous êtes Bouddha. C'est le commencement de la pratique bouddhiste. Vous ne devez pas atteindre quelque chose de spécial. Vous êtes déjà Bouddha. Bouddha signifie que vous ne comprenez pas Bouddha. Bouddha signifie digérer complètement sans rien laisser.
Avoir confiance, qu'est-ce que cela veut dire ? Écouter l'enseignement du Bouddha. Mettez tout votre cœur à vivre en paix et en harmonie avec tous les êtres. Quand vous faites zazen, faites zazen. Ne dormez pas pendant zazen, faites-le de tout votre cœur, parce que l'occasion vous en êtes offerte. C'est l'univers. Nous devons nous jeter dans l'univers. Alors très naturellement, compassion et illumination jaillissent de notre zazen.
Qu’appelons-nous Bouddha ? Ce n'est rien d'autre que la vie quotidienne. La pratique n'est pas une chose particulière parce qu'elle n'est rien d'autre que la manifestation totale de la vie humaine, complètement digéré.
Ce n'est rien d'autre qu'exprimer constamment votre gratitude."
Agir sans peur lorsque nous sommes complètement présent à nous même et à ce qui nous environne. Ce n’est pas agir juste pour agir – vous risquez de mourir si vous agissez sans prendre en compte tout ce qui est.
Mais à ce moment là, vous ne pouvez pas vous angoissez pour ce qui se passera ensuite. Sinon vous ne bougez plus. Et il faut agir- qui n’est pas réagir !
Vous agissez quand tout est parfaitement digéré, et à ce moment là, vous n’êtes plus dans cette action, vous êtes le pas- et c’est la gratitude qui va s’exprimer dans votre action.

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