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  • Photo du rédacteurJoshin Sensei

Au coeur de cette « chose »…


Donc Harada Roshi parle de « cette chose », qui n’est ni nous, ni personne. En fait, il dit, ce n'est absolument rien, et pourtant c’est ce qui constitue nos vies. Et « cette chose », en la divisant, comprend le corps physique et l'esprit ; et ensuite il explique rapidement les 5 skandhas- c’est-à-dire agrégats, tas ou amas, flux, j’y reviens ensuite.



C'est une notion qui nous est extrêmement étrangère au départ en tant qu'occidentaux, mais qui est essentielle pour entrer dans les Enseignements, alors je ne peux pas l’expliquer vraiment là dans ce cadre, je voudrais juste faire un survol, une sorte de de schéma.

Pour comprendre pourquoi Harada Roshi parle de « cette chose ».  Il dit : « le corps physique est composé de 4 éléments » : l'eau, le feu, la terre et l'air. Et à partir de là, ça s'amalgame, ça se transforme et ça donne les organes des sens.

On dit pour aller plus vite, le corps physique, mais ce n'est pas très juste : l’appeler « corps », c’est rassembler le tout et former un concept, on parle plutôt de « forme ». En fait, au départ, plutôt qu’évoquer le corps, on va parler de « organes des sens » : « Sous ce terme de dérivés des 4 grands éléments, on comprend les 5 organes matériels des sens, et les objets qui leur correspondent dans le monde extérieur, c’est-à-dire les formes visibles, les sons, les odeurs, les saveurs et les choses tangibles, et également pensées, idées et conceptions qui appartiennent au domaine des objets mentaux »


Deux choses étranges pour nous: les 5 organes matériels et puis l'esprit qui est considéré comme « organe des sens ». Mais ça ne s'arrête pas là parce que cette forme, donc ce premier skandha, ça comprend à la fois les organes des sens et puis ce qui leur correspond dans le monde que nous voyons comme « extérieur ». Alors que pour moi, il y a mes yeux et puis il y a tous les objets que je vois, et c’est bien différent, dans cette approche, il y a les deux en même temps, non séparés.

Sous ce terme « forme », « on comprend les 5 organes matériels des sens et les objets qui leur correspondent dans le monde extérieur, et l’esprit avec pensées, concepts, idées. » Donc à ce moment-là, il n’y a pas de séparation entre ce que j’appelle intérieur et ce que j’appelle extérieur.


Ensuite, il y a les sensations. Alors pour expliquer ces 5 « tas », je vais prendre l'exemple d'un bébé ; on va suivre un bébé : il y a le corps, il y a les organes des sens, ça c'est la naissance.

Et puis après il y a les sensations : agréable, désagréable et neutre.

Un bébé reconnaît tout à fait une sensation agréable, on le voit sur son visage. Il reconnaît tout à fait une sensation désagréable, il fait une petite grimace un peu rigolote avant de se mettre à hurler ! Et puis il y a des sensations neutres.

Neutre, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de sensation. Il y a sans arrêt une sensation, notre corps, ne serait-ce que l'air sur notre peau, voilà. Et nos yeux reçoivent sans arrêt, les objets de la vue, même si on n’en a pas conscience. Neutre, ça veut dire que ça ne déclenche ni sentiment agréable, ni sentiment désagréable. Donc sensation, le bébé, ça, il le reconnaît tout à fait. 


3ème skandha: ce bébé a un peu grandi, c'est un tout petit enfant; on arrive à la perception.

TNH dit « l'agrégat de la perception comprend le fait de remarquer, de nommer, de conceptualiser, ainsi que celui qui perçoit et qui est perçu ». Ça veut dire que là, déjà, il y a un grand pas en avant. D'abord, la première idée, moi qui perçois et ce qui est perçu, et puis il y a comme une re-connaissance de ce qui est perçu. C'est déjà basé sur une mémoire qui dit par ex pour le bébé, ça, ça sent bon. Donc c'est déjà basé sur des expériences passées c'est quelque chose qu’il aime peut-être à un moment il va appeler ça, gâteau ou bouilli.e...

On commence à avoir des schémas mentaux et donc des facteurs subjectifs, ça c’est agréable/désagréable dans la perception du monde extérieur. 

Le problème, c’est que cette perception peut être fausse. TNH dit : «  nos perceptions sont souvent erronées et nous souffrons ». Par exemple, nous pensons que quelque chose est bon – une cigarette, un verre d’alcool, et en fait, c'est mauvais...Il y a un soutra qui dit qu'on se trompe sans cesse : nous prenons pour désirable ce qui n'est pas désirable. Nous prenons pour non désirable ce qui est désirable... 



Le 4éme skandha, tas, ou flot : là, c'est difficile de trouver une traduction, ici, on a choisi volition. Il y a aussi formation mentales au pluriel, moi ça me semble plus intéressant. Pour continuer mon exemple, je pense que c'est le plus facile pour expliquer rapidement, donc le bébé : mon bébé au départ, il avait donc juste des sensations et ensuite ces sensations sont transformées en perception. Il perçoit qu'il y a à l'extérieur, là, enfin, dans cette perception, qu'il y a quelque chose qui est intéressant, qui est bon, qui est souhaitable. Cela parce que ils s'appuie sur des souvenirs, sur des expériences déjà faites.

Et puis il a grandi, maintenant il peut se déplacer à 4 pattes, à moitié en sur le ventre et il va aller vers cette source de sensations agréables parce qu'il reconnaît que s'il arrive à crapahuter assez vite, il va pouvoir attraper un gâteau.


Et donc là on entre dans le moment où il y a du vouloir, du faire, basé à la fois sur le corps, actes, paroles, et sur l’esprit, sur le passé, le futur, l’attente, etc : c’est une « formation »

Jusqu'à présent, c'était des des choses ressenties. Mais là on passe une étape, on est dans le vouloir, on est dans le faire, en l'occurrence on est dans le « chercher à attraper » ( qui va être récurrent dans notre vie ! ).

Et il y a qqc qui va commencer: par ex, je passe près d’un fleuriste. Ça sent bon, j'aime beaucoup les jacinthes, ça sent les jacinthes et je me dis Ah voilà, je vais aller acheter des jacinthes, mais je n'ai pas assez d'argent, tant pis, je vais prendre l'argent qu'on m'a donné pour faire d'autres courses...Avidité ! Et donc à partir du moment où il y a du vouloir, il peut y avoir les 3 Poisons.... Ou bien je peux me dire je vais dépenser l'argent que j'avais gardé pour autre chose pour acheter cette jacinthe, pour faire plaisir à quelqu'un en lui offrant.

Donc voilà, à partir du moment où il y a ce vouloir, il y a un karma qui va naître parce qu'il y a des actes, à travers corps paroles, esprit donc là on entre dans le domaine le plus important de tout ce processus, c'est-à-dire le domaine de l'intention. 


TNH : « La peur est aussi une formation, une formation mentale. Notre corps est une formation, une formation physique. Les sensations et les perceptions sont des formations mentales. Certaines sont désirables et nous aident à transformer notre souffrance (les formations mentales dites positives ou bénéfiques), tandis que d’autres nous enferment dans notre souffrance (les formations mentales dites négatives, néfastes ou préjudiciables). Toutes les « formations » sont impermanentes. »


Là, je reviens sur ce mot: skandha. On le traduit par « agrégats », des choses qui se sont agrégées pour former un tout, un ensemble, que j’appelle « moi ». On pourrait dire « amalgame ». On le traduit aussi par 5 « tas ou amas » : imaginez 5 tas de sable qui coulent les uns sur les autres, qui se mélangent.. .Déjà il y a qqc d’actif. Mais ce que je préfère, 2 autres traductions possibles : des amas de combustibles, 5 amas de combustibles, et tout ça, ça brûle. C'est nous qui brûlons sans cesse, brûlons à partir de la soif, à partir du désir, à partir de l'avidité.

Et enfin, 5 flots, 5 flux, parce que c'est quelque chose qui est toujours en mouvement. On est sans cesse en contact avec le monde extérieur. Moi, ce qui me parle le plus.


Pourquoi cette vision de 5 skandhas est-elle si difficile pour les Occidentaux ? D’abord, parce que nous avons une sorte d'esprit scientifique. C'est très loin pour moi l'esprit scientifique, mais je vois bien que j'aime bien avoir des étapes, des découpages, quelque chose avec une étiquette : ici, sensation, ici perception, ici formations mentales... Mais ça ne marche pas parce que tout s'entrecroise sans cesse.

On peut imaginer des rivières qui se mêlent par exemple : ça se mêle et et il y a telle ou telle couleur de rivière qui va être plus marquée à un endroit ou à un moment, et puis un autre endroit, une autre couleur ; des phénomènes sans cesse en mouvement.

Il n’y a pas de moment tant que nous sommes vivants où nous n'ayons pas un contact à travers nos sens, mais on ne va pas y faire attention tout le temps. Il ne va pas y avoir une sensation qui va naître tout le temps, il ne va pas y avoir une intention qui va naître tout le temps, mais nous sommes sans cesse en contact et tout d'un coup hop, quelque chose a attiré notre attention et à ce moment-là tout tout va s'entremêler, tout va s'entrecroiser.


C'est comprendre un processus, mais et c’est là je pense la clé du problème : moi je me vois comme fixe, continue, même si je vois bien en même temps que je change, physiquement, idées, façons de vivre, tout le temps ! C’est mon paradoxe !


Et le dernier élément, le 5ème skandha, la conscience.  Harada Roshi va en parler la semaine prochaine. Je peux dire que je pense qu’ on a souvent l'idée de la conscience comme quelque chose qui flotte, un peu -au-dessus...Mais ici la conscience est complètement mêlée à ces flux. Et la conscience, ce qu'on peut en dire, c'est que c’est toujours conscience de quelque chose.
 Ici c’est la base de tout ce que nous sommes et l'essence de toutes nos formations mentales.

C'est ce qui va nous permettre en fait de consolider, de rassembler un petit peu tous ces flux, toutes ces rivières, tous ces amas dans une seule idée qui qu'on va penser stable, permanente, continue et qu'on va appeler.”je”. Et ce « je » qui va se lancer dans la recherche permanente de sensations agréables, ou dans s la fuite des sensations désagréables... 

Et là, le bébé, en quelque sorte, a énormément grandi ! C'est nous et nous sommes de plus en plus enfermés dans notre image du moi, dans des réactions automatiques, telle sensation à telle perception, et nous nous sommes de plus enfermés dans dans nos formations mentales.


Je pense que il n’y a vraiment que zazen qui va être une solution, une ouverture, « casser les murs » !et qui va nous apporter de l'air et nous permettre de regarder de plus près ces amas dont nous sentons bien à certaines périodes de notre vie, à des moments de cassure, de coupure, à des moments de grand choc, que ce n'est ni stable, ni permanent, ni continu. 

« Cette chose » : amalgame de ces 5 flots. Or, aucun ne peut être tiré de l'ensemble, il n’y a pas une sensation sui ne soit pas relié à tout le reste. Il n'y a pas un organe de sens qui ne soit pas automatiquement en contact avec quelque chose qui est vécu comme extérieur. Même si on ne s'en rend pas compte, n’est-ce pas.


Donc on va dire que chacun de ces skandhas, de ces tas, de ces flux, chacun est vide, non pas qu'il n'existe pas, mais qu’il ne peut pas exister en soi, tout seul, séparé, indépendant. C'est ça ce qu'on appelle vide dans les enseignements, c’est l’histoire de la fleur de TNH.

Et donc si chacun de ces flux est vide, eh bien, l'ensemble qu'ils constituent, l’assemblage, est vide aussi 0+0+0 ...Donc ce que je pense « moi » est en fait un « non-moi » «  cette chose ».

Ce qui fait que le Bouddha va dire ces dernières paroles, « Tout ce qui est assemblé doit être dés-assemblé. »


On est une sorte d'assemblage qui tient plus ou moins, mais avec cette idée qu’il est très stable et très permanent. Or : tout ce qui est réuni va être désuni, assemblé/ des-assemblés, etc.  


En résumé Kazuaki Tanahashi :

Nous percevons, ressentons, agissons : nous sommes attirés vers qqc et nous faisons des distinctions à travers notre cœur, notre esprit et notre corps. Nous recevons sans cesse des infos et nous y répondons à travers ces aspects constamment changeants de notre existence.

A chaque moment ces 5 flots travaillent simultanément et aucun ne peut être isolé du reste. Donc aucun n'existe dans des limites fixes, bien précises.

Alors nous pouvons dire que chaque flot est shunya (KU, Vide, Vacuité...) en lui même et en même temps une partie des autres qui fonctionne. Au milieu des phénomènes où toutes les choses changent, la réalité des interactions sans limite continue et cela ne change pas.








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