Aujourd'hui j'aimerais raconter une histoire, une histoire pour faire sourire, mais aussi une histoire qui est dans la continuité, je pense, de tout ce que j'ai pu dire et lire tous ces derniers mois.
C'est une histoire qui commence à Marseille, un été,il y a quelques années ; j’étais arrivée le matin même pour une retraite de week-end dans un lieu assez petit et on était assez nombreux, il faisait extrêmement chaud dans la pièce.
Et je reconnais avoir eu une pensée qui m’a traversée, et qui disait, « mais vraiment je serais mieux en train de me baigner que sur mon coussin » !
Ca m’a fait sourire, j’ai laissé passer, mais du coup ça m'a inspiré si je peux dire, l'enseignement que j'ai donné ce jour là et parce que j'ai eu encore une fois très chaud depuis mon retour, et aussi aux États-Unis. j’ai envie de partager ce qui m’est venu à l’esprit
Quand je vais quand je vais me baigner, j'aime beaucoup me baigner dans la mer ou dans l'océan, e j'aime faire , ce qu'on appelle faire la planche. Vous voyez : vous êtes là allongé sur l’eau et puis simplement bah vous vous laissez porter, vous vous laissez flotter ; alors vous allez un petit peu à droite à gauche iau fil des courants ou du vent.
Et puis de temps en temps il y a une vague un petit peu plus forte qui vous arrive sur la figure ! vous avalez un petit peu d'eau, vous respirez un petit peu d'eau mais ça va, ce n’est pas grave, et puis voilà vous vous restez tranquille, vous êtes bien ; simplement vous vous laissez porter
Et ce qui m'est venu ce jour-là à Marseille où il faisait si chaud : je me suis dit mais en fait zazen, c'est exactement comme faire la planche dans l'océan. On n’a rien à faire du tout, seulement à se laisser porter parfois un peu à droite parfois un peu à gauche ; parfois bah il y a des pensées-émotions qui vont naître alors c'est comme avoir un petit peu d'eau dans la figure ! ce n'est pas bien grave, on laisse passer, on continue parce qu’ on est vraiment vraiment très bien...
Et vous avez peut-être essayer d'expliquer à une autre personne comment vous faites pour faire la planche ; vous allez lui dire, écoute c'est très simple en fait tu vois tu n'as absolument rien à faire, tu t'allonges sur l'eau et tu te laisses porter et tu vas voir c’est automatique, tu te laisses porter tranquillement, tu n'as rien à faire.
Alors la personne peut-être après un coup d'œil un petit peu incertain essaye, elle s'allonge sur l'eau mais en fait elle s'appuie trop peut -être parce qu'elle a un petit peu peur, elle bouge un petit peu trop et puis là-dessus, il y a la petite vague qui vient, et à ce moment-là, elle s'agite dans tous les sens et voilà elle boit la tasse pour finir. Et elle vous regarde d'un air accusateur en vous disant tu vois bien c'est pas comme ça dis-moi comment faire...
Voilà, c'est comme zazen, c'est complètement impossible d'expliquer comment faire !
Il n’y a rien de plus que lui dire, vas-y, fais-le, tu vois je peux te montrer mais vas-y, fais-le personne ne peut le faire à ta place, il n’y a aucune explication possible autre que : ne fais rien, laisse-toi porter, lâche prise... Aie confiance !
Abandonne-toi à cette immensité de l'océan et aies confiance. Et voilà là, on retombe sur ce que disait Katagiri Roshi : confiance. Confiance et foi. Il disait que la foi n'est pas une croyance en en quelque chose. Il disait : « La vraie foi signifie que vous devez juste être là, vous baigner dans le silence et l'immensité de l'existence. Cette foi est appelée confiance. »
Avoir confiance que je peux le faire, que je vais me laisser porter sans faire d’effort, sans essayer de contrôler la situation !
J’ai confiance que tout va bien et -dans ce cas précis que tout l'océan est là pour m'accueillir et en zazen, c’est l'immensité, dit Katagiri Roshi, l’immensité de l’existence... Pour moi, l'immensité de quoi, je ne sais pas, je n'ai même pas de mots…. L'immensité, l'Immensité tout court peut-être l'immensité avec un I majuscule... je ne peux pas dire Bouddha ou alors au sens le plus vaste du terme bien sûr ; c'est l'immensité ce qu'on est profondément, de ce moment où je suis reliée à tout. C’est zazen !
Se laisser porter et bien sûr on ne s'est pas enfui de soi, on n'est pas immergé dans un ensemble ; je ne pense pas que ce soit le sentiment océanique dont parlais Jung : on n’est pas perdu, on est présent, on bouge, il y a les petites vagues.On est à la fois dans l'immensité et en soi...et voilà tout ça c'est exactement exactement zazen.
Alors maintenant c’est la fin de l'été. Peut-être que vous êtes allés au bord de l'océan, au bord de la mer, peut-être que vous avez pu goûter cette immensité de l'océan . Quand on regarde une mappemonde on voit que l'océan est beaucoup plus grand que les terres émergées... Mais maintenant, vous savez que vous pouvez, à chaque chaque instant, en chaque lieu, dans toutes situations, goûter cette immensité de zazen, et vous laissez porter…
Même pas besoin de l’océan finalement...c’est comme cela que ce jour là à Marseille j’ai mis fin à ma rêverie...En trouvant une immensité plus grande que celle de l’immense océan... et là, comme le disait maître Dogen, dans cette immensité-là, nous trouvons nous-mêmes et nous trouvons notre joie.
C'est merveilleux, on n’a pas besoin d'être en vacances, on n’a pas besoin d'avoir le bord de mer ! On a juste besoin de plier quelque chose pour s'asseoir et aussi, et surtout, de confiance. Voilà... c'est la joie de l'immensité et la joie et le bonheur du Dharma.
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